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Rare tabatière en or de présent impérial au portrait de l’empereur Napoléon
SOLD
Rare tabatière en or de présent impérial au portrait de l’empereur Napoléon
Par Étienne-Lucien BLERZY pour MARGUERITE, la miniature par Jean-Baptiste ISABEY
SOLD
Object N° 1874

Tabatière de forme ovale en or 20.5 carats (840 millièmes) ciselé de losanges en damiers, les bordures émaillées bleu sont rehaussées de rinceaux et couronnes impériales stylisées en or. Le couvercle s'ouvrant à charnière est incrusté d'un portrait miniature ovale peint sur ivoire figurant l'empereur Napoléon Ier en buste, de trois-quarts à droite, en uniforme de colonel des grenadiers à pied de la Garde impériale, signé et daté à droite "Isabey 1806". Doublure en or.

Gravée sur la bordure intérieur du couvercle : « Marguerite Joaillier de la Couronne de leurs Maj(es)tés Imp(éria)les et Roy(a)les ».

Très bon état.

Paris, circa 1806-1807.

Poinçon d’orfèvre d'Étienne-Lucien BLERZY (insculpation 1801-1802).

Poinçon à tête de bébé de 2e titre pour Paris, 1798/1809.

Ce poinçon d'essai, non officiel, fut utilisé par les orfèvres parisiens sur leurs productions d’or de deuxième titre, très souvent des pièces de luxe.

L. 8,8 x P. 6,4 x H. 2 cm. Poids brut : 145,2 g.

Provenance

- Collection Chas. E. Dunlap, Royaume-Uni.

- Collection privée, France.

Oeuvres en rapport

- Une tabatière en or par Marguerite avec miniature de Napoléon par Isabey datée 1807, 8,2 x 5,1 cm, est conservée au Musée des Arts Décoratifs du Grand Curtius, Liège (Belgique) (inv. M.A.A.D. 10 / Mx / 1216, ill. 1).

- Une tabatière en or par Marguerite avec miniature de Napoléon Bonaparte, Président de la République Cisalpine, par Isabey, est conservée aux Musées de Malmaison et de Bois-Préau (inv. MM.68.5.1).

- Une tabatière en or bordée de diamants par Marguerite et Blerzy avec miniature de Napoléon par Isabey, 8,6 cm, vente Sotheby Parke Bernet, Genève, 11 novembre 1981, lot n°69.

- Une tabatière en or au chiffre «N», non émaillée, par Marguerite et Blerzy, 9 cm, vente Bonham's, Londres, 23 novembre 2011, lot n°14 (adjugée 65.832 €, ill. 2).

- Une tabatière en or émaillé bleu au chiffre «N», par Blerzy pour Marguerite, 9 x 5,5 x 1,5 cm, vente Osenat-Binoche & Giquello, 15 novembre 2014, lot n°185 (adjugée 75.000 €), ancienne collection du Palais princier de Monaco (ill. 3).

- Une tabatière en or par Blerzy pour Nitot avec miniature de Napoléon non signée, 9 x 5,5 x 2,2 cm, vente Thierry de Maigret, Drouot, 28 juin 2019, lot n°131 (adjugée 68.264 €), ancienne collection Amaury Taittinger (ill. 4).

Historique

Notre boite ovale en or, semble-t-il inédite sur le marché de l'art, a été réalisée par le bijoutier joaillier de S.M. L’Empereur, Bernard-Armand MARGUERITE, comme l'atteste l'inscription gravée qui figure sur le bord de la boîte. Marguerite était installé 118 rue du Coq Saint-Honoré à l'enseigne du Vase d'Or, où il avait succédé à son beau-père Edme-Marie Foncier qui avait déjà été le joaillier de Joséphine sous le Directoire. C'est également pour l'Impératrice qu'il fut amené à réaliser quelques unes des pièces de joaillerie lors du sacre du 2 décembre 1804.

La miniature qui orne la partie supérieure est signée d'ISABEY (1767-1855) et datée de 1806. Jean-Baptiste Isabey, originaire de Nancy, est arrivé à Paris en 1785 où il sera brièvement l'élève de Jacques-Louis David. Il s'attache rapidement à la famille de Beauharnais et de là tout naturellement à la personne même de l'Empereur. Il est généralement considéré comme le maître de la miniature française du XIXe siècle. Il existe au Musée de Malmaison une tabatière et une bonbonnière, dues au talent associé de ces deux même maîtres, la seconde représentant quatre portraits de la famille de Beauharnais fut offerte par Joséphine à Napoléon.

Le portrait miniature connaissait alors une vogue sans précédent, vogue entretenue par les guerres révolutionnaires puis par les campagnes napoléoniennes, chaque soldat souhaitant emporter au loin le souvenir de l’être cher, chaque femme conserver près d’elle le visage de l’être aimé. Les portraits étaient peints à l’aquarelle et à la gouache sur une fine feuille d’ivoire puis simplement encadrés sous verre, enchâssés dans le couvercle d’une boîte – généralement une tabatière pour les hommes – ou montés sous forme de bijoux – médaillon, bague, épingle ou bracelet pour les femmes.

Objet intime et sentimental réservé à un usage privé, la miniature permettait également de diffuser l’image officielle des souverains. Dès le Consulat, Napoléon confia à Isabey une grande partie de la production de portraits destinés à être enchâssés sur le couvercle de boîtes de présent. Héritée de l’Ancien Régime, la pratique du présent diplomatique avait été remise en vigueur par le Premier Consul dans un arrêté du 7 Thermidor de l'an VIII (26 juillet 1800) : "le présent d’usage du gouvernement français aux ministres étrangers sera une boîte d’or, portant le chiffre R.F, enrichi de diamants".

Après le Sacre, les commandes aux joailliers Marguerite ou Nitot se firent plus nombreuses afin de satisfaire la demande croissante de cadeaux officiels. Désignées le plus souvent par l’appellation de tabatières, ces boîtes correspondaient, par leur richesse, la présence d’un portrait miniature de l’Empereur ou de son chiffre éventuellement pourvues de brillants, à la qualité du récipiendaire et à la valeur du service récompensé.

Le portrait miniature était payé 500 F pièce puis, à la suite de réclamations d’Isabey, 600 F à partir de 1808. Pour répondre aux nombreuses commandes, l’artiste faisait travailler son atelier, se réservant le soin d’exécuter les visages ou se contentant de signer un portrait déjà achevé par ses élèves. Napoléon, qui préférait être représenté en uniforme militaire plutôt qu’en costume de sacre, exprima en 1807 un fort mécontentement au sujet des derniers portraits sortis de l’atelier d’Isabey, réaction assez révélatrice de la production répétitive de ce-dernier.

Le 12 mai 1806, l'Empereur arrêta qu'il ne serait plus fait de présents en diamants et qu'on s'en tiendrait aux produits des manufactures françaises. Dès la même année,

nous voyons le souverain changer d'avis et ordonner la confection de 100 tabatières d'or au bijoutier Marguerite, enrichies de brillants pour quelques-unes, et avec portrait pour le quart environ. Cette dépense s'éleva, en totalité, à 380.688 F. Marguerite fut obligé de sous-traiter à l'orfèvre Etienne-Lucien Blerzy, comme le montre notre tabatière. Blerzy travailla également pour Nitot.

L'année suivante, en 1807, le grand maréchal du palais, Duroc, transmit à l'intendant général de la maison de l'Empereur, Daru, une pareille commande, sur les mêmes bases. Elle fut exécutée par les joailliers Marguerite et Nitot et Fils. Bernard-Armand Marguerite, pour 50 tabatières, reçut 182.375 F. Étienne Nitot, par suite d'un petit changement, livrèrent 42 tabatières et 12 bagues, pour 184.391 F. Vingt-cinq "petits portraits" (à 600 fr. l'un) coûtèrent en tout 15.000 F, ce qui coûta au total 381,766 F pour l'année 1807 (Arch. nat. 0230).

Le 12 septembre 1807, M. Desmaisons écrit au grand maréchal : « D'après vos ordres, j'ai dit aux fournisseurs qu'ils seraient payés au fur et à mesure de leurs livraisons, afin d'activer leur zèle. J'ai fait déposer au trésor de la Couronne onze boîtes enrichies de brillants faites par MM. Nitot. "Il y en a quatre à portraits dans les prix de 10,000 et de 6,000 F ; deux à cercles et chiffres d'environ 6,000 F et cinq d'environ 3,000 F ; mais je n'ai rien pu encore obtenir des portraits de M. Isabey ; les boîtes les attendent. J'ai bien d'autres peintres, mais comment leur demander des ressemblances, sans séance ?" Les autres peintres en question figurent dans un mémoire du 2 février 1808 où sont mentionnés les artistes suivants: Saint (7 portraits à 600 F pièce), Nitot, Aubry, Gauci, Mimeret, Prosper, Quaglia (Arch. nat. 0930).

Littérature

Alphonse Maze-Sencier, Les fournisseurs de Napoleon Ier et des deux impératrices, d'après des documents inédits, Paris, 1893, p. 276.